lundi 30 décembre 2019

La Reine des Neiges 2 : Le domptage des éléments, c'est moi !

Olaf au Japon.

L'autre jour avec ma gamine de 5 ans et Madame, nous sommes allés au cinéma voir Olaf. Oui, Olaf, ce petit personnage en forme de bonhomme de neige absolument rigolo, à l'humour totalement adapté aux plus de 10 ans, c'est dire que j'ai réussi à suivre. Pour le reste, l'aventure qu'il y avait autour de lui, je ne me souviens plus, mais il était question d'une Reine des Neiges "2" nommée Elsa, de sa sœur qui est très courageuse et qui s'appelle Anna, d'un renne au prénom nordique et d'un blond qui s'appelle Christophe. Il fallait qu'ils domptent l'eau, la terre, le feu et l'air, et c'était plein d'aventures palpitantes.
Pour ce qui nous concerne, il nous a fallu, nous aussi, dompter les éléments. D'abord pour arriver au Grand Rex, la salle de cinéma parisienne où nous avions réservé la séance. On n'est pas des malins : on habite en banlieue, et on réserve dans un cinéma en plein cœur de Paris, en pleine période de grève des transports. Qu'importe, nous sommes des courageux comme Anna, nous y sommes allés. En trois bus successifs, deux réanimations de la gamine compressée par la foule, trois orteils brisés par des coups de talons bien trop nombreux, et une heure et demi, nous étions arrivés à Châtelet, première étape de notre périple. Là, après avoir fendu les airs (vous noterez le premier élément vaincu : l'air), nous avons pris notre temps pour nous restaurer. Une riche idée, vu la suite des événements. Car après notre pause déjeunatoire, nous avons marché une demi-heure pour arriver sur les Grands Boulevards où s'élève l'historique Grand Rex, une heure avant le début de la séance. A ses côtés flânait une file de touristes à la queue-leu-leu du plus comique effet : pourquoi donc se ranger, immobile, contre le bâtiment, pour rien ? Erreur. Elle s'avérait être la file d'attente, déjà présente, grandissant chaque minute, qui devait nous mener en salle. Nous rejoignîmes ce groupe de comiques et attendîmes en nous ennuyant profondément.
Une fois conduits à grands coups de badines à l'intérieur,  nous avons adopté des places vers le fond de la salle, avec une bonne visibilité. Nous avons pu assister à des pubs, puis à une première partie avec la "féerie des eaux" (autrement dit des jets d'eau artistiquement maîtrisés sur de la musique moderne), puis à des pubs, puis au film dont j'ai magnifiquement décrit l'histoire dans les premières lignes de ce billet haletant. Ma fille était ravie, et comme je suis terre-à-terre, son ravissement m'a ravi (vous noterez le deuxième élément vaincu : la terre).

Réchauffement climatique

Par contre le retour n'a pas été joyeux. La Reine des neiges n'est plus ce qu'elle était, et elle aussi est maintenant dominée par le réchauffement climatique : en sortant de la salle, au lieu d'une neige hivernale sympathique, nous étions sous les déluges d'une pluie battante. Le métro le plus proche était fermé, celui qui, plus éloigné, était censé être ouvert ne l'était pas, et les bus étaient rares et bondés au point que les poings étaient meilleurs garants pour pénétrer le véhicule que le pass Navigo. Refusant de nous laisser abattre par l'écoulement des eaux célestes, nous dûmes emprunter (que dis-je, payer, et pas qu'un peu) un VTC (vous noterez le troisième élément vaincu : l'eau). Notre dernier voyage (de la journée, hein, je ne parle pas poétiquement de notre mort) dura une heure, à l'abri, guidés par un fier cocher n'hésitant pas à forcer les passages et les feux de signalisation pour nous faire arriver à bon port (vous noterez le quatrième et dernier élément vaincu et brûlé : le feu).
Autrement dit, la Reine des Neiges 2, c'est pas mal, c'est efficace comme du Disney, ça plaît aux enfants, la bande originale va recommencer à prendre la tête des adultes pendant des mois, et Olaf a été parfait dans son rôle. La seule faiblesse du récit, c'est que notre aventure à nous était bien plus haletante, convenez-en.


samedi 2 novembre 2019

Le Gros Diamant du Prince Ludwig : Casse nawak


C'est l'Amérique des années 50, avec des musiciens en live, des matons pas futés, des taulards en cavale, un pickpocket trop honnête, une amoureuse peu fidèle, des amants pigeonnés, un voyou abruti, un banquier colérique, un policier frimeur, une mère poule qui couve autre chose que des oeufs, et Warren Slack, le plus vieux stagiaire des USA. (pitch officiel)

On se demande comment une bande de bras cassés de cet acabit réussissent au final à voler le gros diamant du prince Ludwig. Spoiler ? Certes, mais le déroulé de l'histoire n'est pas ce qu'il y a de plus frappant dans cette pièce. A la limite, peu importe. Chaque étape, chaque scène, est juste l'occasion de développer du gag, du comique de répétition, du foutraque, du grand nawak de n'importe-quoi qui fait rire, et c'est là l'essentiel. La mise en scène qui conduit au casse du siècle - ou au moins de la soirée - est très rythmée, musicalement agrémentée d'un vrai groupe qui joue en direct sur le côté de la scène (clavier, contrebasse et batterie) et dont les membres participent à la comédie, et surtout originale niveau visuel. Il est une scène qui ravit particulièrement l'oeil (et le perturbe en même temps) : celle que l'on voit comme si nous étions installés au-dessus d'elle, vue du plafond en quelque sorte. Là je ne spoile pas davantage, c'est absolument étonnant. Alors ne pas hésiter à voir cette pièce, c'est la déconne totale, pas de philosophie ni de réflexion politique ou sociale et ça fait du bien en cette période politico-socialement chiante, et le Molière de la meilleure comédie est mérité.

Le Gros Diamant du Prince Ludwig. Auteurs : Henry Lewis, Jonathan Sayer, Henry Shields. Mise en scène de Gwen Aduh. Au Palace (Paris) actuellement. 

mercredi 25 septembre 2019

Verdun : Une série BD historique sur le massacre de 1916

BD Bamboo Editions

Des coulisses du pouvoir à l'horreur des tranchées, va se jouer le sort de la Grande Guerre
Décembre 1915, les Allemands semblent préparer une attaque d’envergure sur l’un des points stratégiques de la ligne de défense française, à Verdun. Mais le Maréchal Joffre se refuse à renforcer la zone, persuadé que la vraie bataille se jouera en Champagne. Janvier 1916, l’attaque ne fait plus le moindre doute. Seul un miracle pourrait sauver Verdun. Et le miracle se produit : pendant des jours, la pluie s’abat sur la ville, repoussant l’offensive des troupes allemandes. (présentation éditeur).


Certes je me réveille un peu tard : cette BD est sortie en 2016. Mais avouez que ça ne change rien à la date de la bataille de Verdun - révisez vos livres d'histoire, vous verrez - ni à la qualité de cet album - lisez-le, vous constaterez. Et puis c'est un cadeau de ma femme - critiquez, vous verrez.
Dans cette histoire, on parle d'Histoire. N'allez pas chercher du romanesque ou des aventures de la vie quotidienne d'obscurs citoyens de l'époque sur fond de guerre, comme la série "14-18" l'avait très bien développé (voir mes chroniques sur cette série ici). Dans "Verdun" (trois tomes parus), on met en scène le déroulement de la grande bataille, sur un scénario historique qui n'exclut pas la "petite histoire", comme ce Pétain dérangé pendant ses ébats avec sa maîtresse pour venir sauver la France, ou ce Joffre plus avide de se remplir le ventre qu'à écouter les informations alarmantes qui lui sont rapportées sur la situation de Verdun. Un livre d'histoire, en quelque sorte, porté par un excellent dessin, précis et documenté, qui permet de comprendre le contexte et suivre les faits, aussi bien côté français qu'allemand. Incontournable pour les passionnés de cette période sanglante et absurde.

Verdun. Tome 1 : "Avant l'orage". Jean-Yves Le Naour (scénario), Marko, Holgado (dessin). Bamboo Editions, coll. Grand Angle. 2016.

dimanche 22 septembre 2019

Soleil de nuit : Le sommeil se lève à l'aise

Chargé de recouvrer les dettes pour le Pêcheur, le trafiquant de drogue le plus puissant d'Oslo, Jon Hansen, succombe un jour à la tentation. L'argent proposé par un homme qu'il est chargé de liquider permettrait peut-être de payer un traitement expérimental pour sa petite fille, atteinte de leucémie.
En vain. Trouvant refuge dans un village isolé du Finnmark, et alors qu'il est persuadé d'avoir tout perdu, Jon croise la route de Lea (dont le mari violent vient de disparaître en mer) et de son fils Knut.
Une rédemption est-elle possible ? Peut-on trahir impunément le Pêcheur ? (présentation éditeur)


Mais alors Jo, on se laisse aller ? On invite le lecteur dans la tête d'un fugitif et on n'y entrepose qu'un flocon d'angoisses et quelques degrés d'astuce pour s'en sortir ? Et histoire de tirer quelques pages de plus, on invente une petite histoire à l'eau de rose avec une autochtone un peu perdue ? Qu'est-ce qui t'es arrivé, Jo ? Un coup de mou ? Un coup de froid, attrapé dans les fraîches contrées de cette molle aventure ? En tout cas je me suis bien ennuyé. Je ne t'en veux pas pour cette fois, mais franchement malgré le soleil constamment au-dessus de l'horizon en ces lieux nordiques et l'époque de l'année choisie pour ce roman, c'est bien le sommeil qui m'a servi au mien, d'horizon, pendant toute sa lecture. 

Soleil de nuit, de Jo Nesbo. Folio Policier. 2016.

samedi 29 juin 2019

Le Retour à la terre 6 : Tranches de rires campagnardes


Ils sont revenus, ils sont tous là ! Tous aussi foutraques et bidonnant que jadis. Onze ans après le dernier tome, ils n'ont pas pris une ride. Madame Mortemont est toujours doté d'un bon sens bien de chez nous, et en plus elle se met aux nouvelles technologies. Qui sait, en appelant Samsong par la commande vocale, pourra-t-elle en savoir plus sur la vie après la mort, et donc sur le sors de son mari décédé. Sauf que Wikipedia a du mal avec les accents du terroir. M. Henri, le voisin, est toujours aussi taiseux et terriens, mais il doit dégager un charme assez peu visible à première vue, car il a trouvé une compagne jeune et jolie. Il y a bien sûr le héro, Manu Larssinet (vous voyez la référence avec le dessinateur), toujours aussi chargé d'angoisses, en train d'écrire sa BD "Plast" (vous voyez la référence avec la BD Blast qui exprime les tourments psychiques de Larcenet), mais qui peut compter sur l'Ermite, cet ancien maire du coin qui s'est retiré seul dans les bois suite à un redressement fiscal, qui lui sert de confident et de psy. Et puis sa compagne, Mariette. Elle est enceinte du deuxième (après Capucine). Au 7e mois, qu'elle en est. Mais Manu n'a rien vu... Faut comprendre, il écrit "Plast", bon sang ! Deux cents pages, c'est quand même pas rien !
Et puis il y a la campagne. Ah la campagne ! C'est beau la campagne, mais c'est loin. Mais c'est beau. Mais c'est loin. Alors quand Philippe, des éditions Dargaud, est missionné par sa maison d'édition pour aller rendre visite à Manu Larssinet pour lui expliquer qu'il faut en finir avec Plast et ses cases toutes noires, et se mettre à dessiner un projet plus vendeur, la mission se transforme en expédition, en "Man vs Wild" dans la campagne française profonde. Équipé comme un baroudeur, comme un sherpa himalayen, arrivera-t-il à bon port ? Oui, mais dans un sale état.
Jean-Yves Ferri et Manu Larcenet ont eu bien raison de nous remettre les pieds dans la terre et les yeux dans l'humour et la poésie. Un retour à la terre gagnant.

Le Retour à la terre 6 : Les Métamorphoses. Jean-Yves Ferri et Manu Larcenet. Ed. Dargaud. 2019.

mardi 14 mai 2019

La plus précieuse des marchandises : Il était une Shoah



Il était une fois, dans un grand bois, une pauvre bûcheronne et un pauvre bûcheron.
Non non non non, rassurez-vous, ce n’est pas Le Petit Poucet ! Pas du tout. Moi-même, tout comme vous, je déteste cette histoire ridicule. Où et quand a-t-on vu des parents abandonner leurs enfants faute de pouvoir les nourrir ? Allons...
Dans ce grand bois donc, régnaient grande faim et grand froid. Surtout en hiver. En été une chaleur accablante s’abattait sur ce bois et chassait le grand froid. La faim, elle, par contre, était constante, surtout en ces temps où sévissait, autour de ce bois, la guerre mondiale.
La guerre mondiale, oui oui oui oui oui.

(Présentation de l'auteur)


Tout a commencé par ce tweet d'Antoine de Caunes :

Je clique sur le lien Instagram mentionné, je tombe sur la couverture du livre de Jean-Claude Grumberg. Un conte ? Pourquoi pas. Si le grand De Caunes le dit, il faut le lire. Et j'ai lu.
Et là, comme on dit généralement quand on ne sait plus comment dire qu'on a été secoué et qu'il est plus facile de ressortir de vieilles expressions usées jusqu'au squelette de la langue (si, si) : "C'est la claque".

D'abord c'est vraiment un conte. Raconté comme un conte. Je pourrais le raconter à ma fille de 5 ans qu'elle l'écouterait attentivement. Mais sans doute pas avec des étoiles dans les yeux ni de doux rêves à suivre. "La plus précieuse des marchandises" est un bébé, jeté d'un train par son père pour le sauver d'une destination mortelle. C'est la guerre, le train est parti de Drancy, il roule vers un camp de concentration. C'est une histoire monstrueuse. Le bébé est récupéré par une vieille femme - la "pauvre bûcheronne" -, qui vit seule avec son homme - le "pauvre bûcheron" -, et qui rêvait d'avoir un enfant. C'est un conte merveilleux. Elle va le sauver, l'aimer, même s'il vient sans doute de la "race maudite". Son bonhomme de mari, au début rétif, finira par craquer de tendresse à son tour.

"Rien n'est vrai"

Comment ?! Un conte merveilleux, tiré d'un contexte aussi abominable que l'extermination des Juifs ?! Là est la claque, le pied-de-nez que Jean-Claude Grumberg fait aux abrutis négationnistes qui revisitent l'histoire. A la violence du contraste l'auteur va ajouter la percussion de l'ironie, en contestant, en épilogue, la véracité du conte qu'il a "imaginé" : "Rien n'est vrai, il n'y eut pas de trains de marchandises traversant les continent en guerre afin de livrer leurs marchandises ô combien périssables. Ni de camps de regroupement, d'internement d'urgence de concentration, ou même d'extermination."
Les contes pour enfants sont rarement de longs fleuves tranquilles. Lisez le Petit Chaperon Rouge, Barbe Bleue ou Cendrillon (pas les soupes guimauve à la Disney : les vrais contes originaux). Ils sont d'une grande violence mais répondent à des préoccupations psychiques que l'enfant rencontre dans son développement. Ces contes les aident à grandir.
Grumberg a écrit un conte violent. Qu'il circule sous tous les yeux, dans toutes les têtes : lui aussi, à l'échelle des adultes et de l'histoire, aide à grandir.

La plus précieuse des marchandises, par Jean-Claude Grumberg. Ed. Seuil. 2019.

dimanche 7 avril 2019

Les Vieux Fourneaux 5 : Recherche dessein commun


Résumé éditeur : Retour à Paris pour Antoine, Mimile et Juliette. Le plan est simple : ramener Juliette auprès de sa mère, puis filer au Stade de France pour assister au match de rugby France-Australie. C'est du moins ce qui est prévu... Mais, désireuse de voir son père et son grand-père se rabibocher, Sophie les oblige à s'occuper ensemble de Juliette jusqu'au lendemain. Mimile ne peut donc compter que sur Pierrot pour l'accompagner au match. Or, Pierrot l'anarchiste mène un nouveau combat : il s'est engagé en faveur des migrants. Alors vous pensez bien qu'assister à un match opposant la France, qui refuse d'accueillir les migrants, à l'Australie, qui ne pense qu'à les entasser dans des camps, bafouant ainsi les droits de l'homme, c'est hors de question ! Mimile n'a plus pour seule compagnie que ses désillusions... Et si lui aussi était bon pour l'asile ?


Eh bah non ! Ce n'est pas la suite de l'opus précédent pour lequel j'avais reproché, en fin de lecture, le côté inachevé, suspensif, genre "ils ont lancé des pistes, on comprendra mieux dans le prochain numéro". Non, vraiment, raté, le cinquième album repart sur un enchevêtrement de parcours des trois vieux rigolards, qui sont toujours aussi attachants mais dont on ne va pas tarder à se détacher si les auteurs continuent de croire en une rente de situation. Ce n'est pas parce qu'un film a été tiré des aventures des trois potes que la retraite s'impose sur la qualité qui caractérisait les trois premières BD.
Ici, nous avons Pierrot, toujours plus engagé dans l'action anticapitaliste, qui se retrouve au poste de police pour une action inutile de plus. Mais qui est taraudé par ses contradictions : eh non, Pierrot, quand viendra la Grand Soir, tous les flics ne seront pas à pendre avec les tripes de tous les bourgeois. Grande révélation: parmi eux, il y a des gens, des êtres humains, que tu as même cotoyés voire appréciés jadis.
Nous avons Antoine, toujours plus confronté à ses relations familiales compliquées : il se voit confier par sa petite-fille la garde de sa petite-fille en compagnie (surprise !) de son fils (donc le père de sa petite-fille) avec qui il est brouillé depuis longtemps. Histoire de renouer le fil du dialogue, selon la jeune femme. Evidemment, ce sera un peu foireux.
Et puis nous avons Mimile, qui venait à Paris pour aller voir un match de rugby avec ses copains, un peu pris par leurs engagements, lire ci-dessus. Fort marri, lui, l'homme de peu de convictions révolutionnaires, fera l'acte le plus visible de promotion des droits humains en dénonçant devant les caméras, en ouverture du match France-Australie, le sors des habitants de l'île-prison de Nauru, sur laquelle sont regroupés les migrants clandestins arrêtés en mer par les autorités australiennes, dans des conditions inhumaines.
Tout cela est bien raconté, on salue les messages d'engagement en faveur des réfugiés et des droits de l'homme en général, mais on cherche toujours où veulent aller les trois personnages principaux de cette BD, quel est le grand dessein de ces dessins, et en tant que lecteur, on en sort encore une fois un peu paumé. A force de nous balader, les auteurs sont en train de scier la branche sur laquelle ils sont parvenus à s'asseoir avec un certain talent. Et là, j'ai une furieuse envie de leur dire : "Tchao vieilles branches". Dommage.

Pour aller plus loin

Sur l'île de Nauru, très justement dénoncé par Mimile, lire cet article sur le site d'Amnesty International. 

Les Vieux Fourneaux, tome 5 : "Bon pour l'asile". Paul Cauuet et Wilfrid Lupano. Dargaud Ed. Nov. 2018.

lundi 18 février 2019

Tarzan, le film : Les navets poussent même dans la jungle


Il y a quelques temps, j'avais chroniqué le vrai roman de Tarzan, une aventure sauvage pleine de questionnements sur l'humanité, la nature, et l'identité. Hier soir devant la première chaîne en couleurs de mon petit écran, je frétillai dans mon pagne à l'idée de regarder la diffusion du film, dernier en date des adaptations de l'histoire du seigneur de la jungle. Disons-le tout de go(-rille ! ah ah !), c'était pitoyable. Peu d'éléments étaient concordants avec le roman, à part la scène vite expédiée de la mort de la mère d'une maladie sans doute douloureuse dans une jungle hostile où en plus il pleut, puis celle du père attaqué par un singe qui a vraiment une sale gueule, puis le vol du bébé par une bonne vieille singe femelle à l'air gentil, bébé qui deviendra, on l'aura compris, le grand Tarzan.
Les scénaristes du film ont ensuite imaginé une histoire de justicier dans laquelle Tarzan, devenu un vrai gentleman grâce à la civilisation qu'il a fini par intégrer, repart dans la jungle du Congo belge pour traquer de méchants Blancs qui organisent une traite des Noirs. Bien sûr il aura le dernier mot, comme quoi un bon Blanc bien british, au sang bleu, toujours bien rasé mais avec un peu de sauvagerie dans l'âme, est capable de sauver plein d'indigènes à lui tout seul, un peu aidé tout de même par sa femme Jane qui s'est imposée dans le voyage et qui restera de bout en bout d'une rare élégance vestimentaire.
Mais le plus costaud dans cette histoire, c'est la capacité de Tarzan à faire ce qu'il veut de la jungle. Le gars, il maîtrise son sujet, il n'y a aucun doute. Quand il saute dans le vide, il trouve toujours une liane qui traîne là pour s'en saisir et faire des trajets de plusieurs centaines de mètres sans en changer, comme si la liane agrippée était accrochée au sommet de la Tour Eiffel. Quand il croise des lionnes, c'est des copines, il leur fait des câlins. Quand il se bat avec un gorille, il perd, mais il n'a que quelques blessures, moins graves que celles que lui auraient infligées Bruce Lee s'il l'avait croisé dans La Fureur de Vaincre. Tarzan, c'est aussi celui qui sait lire les émotions dans les yeux d'un éléphant. Ou qui sait faire courir des milliers de zébus sur les méchants colons pour les écraser, ou mobiliser des crocodiles pour venir manger le super-méchant qui finit croqué dans d'atroces souffrances et c'est bien fait. Juste un truc : il faudrait que Tarzan suce quelques cachous, parce que son cri est un peu ridicule.
Pour finir, un conseil aux scénaristes d'un éventuel Tarzan 2, le retour : ça coûterait moins cher de le filmer dans l'émission télé "Une Saison au Zoo". Ça serait plus crédible, et plus palpitant qu'au ciné (-léphant... Ah ah !).

Tarzan, réalisé par David Yates, 2016.

lundi 11 février 2019

Hypothermie : Enfile ton polar !


Au bout de la corde bleutée, le cadavre de Maria. Un suicide ? Erlendur n'y croit pas. Il rouvre le dossier. La vie de la jeune femme est un théâtre d'ombres : médiums, insomnies glacées, terreurs nocturnes, les morts vivaient à ses côtés. Quand elle était enfant, son père s'est noyé sous ses yeux. En Islande, on murmure que les secrets les mieux gardés demeurent au fond des lacs. 
(Présentation éditeur)

Sacré Erlendur. Je ne connaissais pas encore ce personnage enquêteur récurrent d'Arnaldur Inidridason, mais en un polar il m'a paru extrêmement sympathique. Humain et torturé de la tête depuis la disparition de son frère dans une tempête de neige alors qu'il l'accompagnait avec son père dans la nature islandaise quand ils étaient enfants, événement dont il garde la culpabilité de celui qui a survécu et pas l'autre. Humain et tracassé par la situation de ses deux enfants, jeunes adultes, en particulier celle de sa fille qui cherche à sortir de sa toxicomanie, et qui le force à discuter avec son ex-femme, comme si un apaisement entre le père et la mère allait soulager le mal-être et guérir ses addictions. Humain et avide de vérité, au point qu'il enquête en marge de ses fonctions officielles de policier, juste parce qu'il a un doute, juste parce que ce suicide par pendaison, dans une maison isolée au bord d'un lac, de la part d'une femme qui a une peur viscérale de la solitude, il y a quelque chose qui le chiffonne, comme dirait Columbo. Il est sensible, et il a du pif, quoi. En remuant les eaux froides du lac, en plongeant un peu dans l'histoire personnelle douloureuse de la victime, en faisant le lien entre ses croyances sur la vie après la mort, et les expériences morbides auxquelles se sont adonnés certains membres de son entourage quand ils étaient jeunes carabins, Erlendur combat les fantômes - y compris les siens -,  et détricote les apparences. Et chacun le sait, quand on détricote, on a froid, surtout en Islande. Alors pour éviter les frissons, le froid dans le dos, ou pire, l'hypothermie, rien de tel qu'un bon polaire pour se tenir chaud. En plus, les polaires, c'est écologique, vu que c'est fabriqué à partir de bouteilles en plastique. Cela tombe bien, Arnaldur Indridason en a, de la bouteille, et ça donne un polar polaire qui s'enfile aisément et qui donne chaud.

La page 77




Pour aller un chouïa plus loin

- En savoir plus sur l'écrivain islandais Arnaldur Indridason (Wikipedia). Vous allez voir, le 2e "d" de son nom n'est pas vraiment un "d".
- Et sur l'expérience de mort imminente, dont il est question dans le livre (Wikipedia).

Hypothermie, de Arnaldur Indridason. Ed. Points. 2007.

dimanche 20 janvier 2019

Voyage au centre de la Terre : Rêver de progrès au fond du trou


Le professeur Lidenbrock trouve un document dans lequel il apprend l'existence d'un volcan éteint dont la cheminée pourrait le conduire jusqu'au centre de la Terre. Accompagné de son neveu Axel et du guide Hans, il se rend au volcan Sneffels, en Islande, et s'engouffre dans les entrailles de la Terre. Ils ne tarderont pas à faire d'étonnantes découvertes...

Dans le genre "grands classiques", Voyage au centre de la terre", c'est du lourd. Des héros qui crient "Diable !" à la place de "P... de b... de m..." comme tout héro moderne normalement constitué, et qui parlent au passé simple, déjà, ça vous classe dans la catégorie des livres qu'on se farcit au collège avec une prof de français qui fait remarquer à quel point certains passage sont désopilants alors qu'ils ne font rire personne. Mais c'est un détail. Jules Verne, c'est avant tout des aventures extraordinaires, qui dépassent les limites de la science. Un auteur qui a imaginé un voyage sur la lune, un tour du monde en 80 jours ou un périple sous les mers, à une époque où c'était de la science fiction, ne peut qu'être admirable. A noter que cette imagination anticipatrice était optimiste : des mondes étaient à découvrir, les sciences allaient inéluctablement nous y promener. On y croyait, aux progrès, du temps du grand Jules ! S'il entendait qu'aujourd'hui certains assurent que nous sommes manipulés par les Illuminatis ou que la terre est plate, il pourrait se vanter de créer le mouvement perpétuel à force de se retourner dans sa tombe.

Aimer l'avenir

La terre plate, justement : s'il était aussi con que certains de nos contemporains adeptes de cette croyance, comment aurait-il créé "Voyage au centre de la Terre" ? En ouvrant un blog sur "Comment ne pas tomber dans le vide sidéral en creusant un trou trop profond" ? Que nenni. Jules Verne était un visionnaire, un homme à l'imagination ancrée dans le réel. Alors certes, souvent, ses œuvres proposent des passages un peu pénibles, de véritables traités de géologie, de paléontologie, de chimie... Dans cette oeuvre, il en est question : on y voit de la roche, du volcan, des phénomènes climatiques, des curiosités phoniques, des bestioles préhistoriques, des effets physiques... Passez-les vite, ou au contraire puisez-y la certitude que le progrès scientifique est avant tout positif et propice aux rêves. Redevenez des gamins passionnés par l'aventure, et des citoyens qui aiment l'avenir ! Lisez du Jules Verne, ça fait du bien ! Que diable !

Voyage au centre de la Terre, par Jules Verne. Téléchargeable gratuitement sur Kobo (avec de belles illustrations d'époque).