lundi 19 octobre 2020

L'Outsider : Du tirage de cheveux dans la prise de tripes

 


Le corps martyrisé d’un garçon de onze ans est retrouvé dans le parc de Flint City. Témoins et empreintes digitales désignent aussitôt le coupable : Terry Maitland, l’un des habitants les plus respectés de la ville, entraîneur de l’équipe locale de baseball, professeur d’anglais, marié et père de deux fillettes. Et les résultats des analyses ADN ne laissent aucune place au doute. Pourtant, malgré l’évidence, Terry Maitland affirme qu’il est innocent. Et si c’était vrai ?

Le gars King - je me permets de l'appeler comme ça, comme si je pouvais lui taper sur l'épaule, depuis le temps que je le lis, c'est un peu comme si j'étais de la famille - vieillit bien à certains égards, mais il est toujours aussi énervant à être capable du pire comme du meilleur. Pour être franc, cela faisait bien une dizaine d'années que je n'avais pas cherché à lire un de ses écrits. J'étais resté sur ce ras-le-bol de me palucher des centaines de pages de descriptions préalables à toute action, sur l'enfance, l'adolescence, les premiers émois sexuels et/ou amoureux de chacun des personnages, puis sur chaque quart d'heure, chaque minute, chaque seconde qui précède le meurtre/la disparition/le truc bizarre qui se passe, devoir lire 560 pages avant qu'il se passe quelque chose... Stephen King, c'est le Marcel Proust des romans fantastiques. Trop c'était trop, j'avais décidé d'arrêter. Et puis là il y a deux mois j'ai voulu retenter l'aventure. L'Outsider. 800 pages en livre de poche, bon c'est beaucoup pour moi mais ça se tente, depuis le temps. 

Côté pile, chouette, Stephen King va davantage droit au but. Enfin de l'action dans les premières pages, disons dans les premières dizaines de pages. Côté pile toujours, la bizarrerie de départ est prenante. Un gars est accusé d'un meurtre odieux sur un enfant, tout l'accuse, y compris ses traces ADN. Et pourtant tout prouve aussi qu'au même moment, il était à des centaines de kilomètres de là, témoignages et vidéos à l'appui. Un scénario comme celui-là, ça doit donner un final de ouf. Non ? Parce que pour ma part, j'ai été super pris par le suspens, dans la première moitié du livre, je n'en pouvais plus de ne pas savoir.

Sauf que, au final, rien de très ouf. Le final, c'est une pirouette Kingesque tirée des contes et légendes locales avec une espèce de truc un peu monstrueux qui peut prendre la forme qu'il veut. Et tant pis pour la divulgâche. Au début ça prend bien aux tripes et puis c'est tiré par les cheveux. Et un cheveu sur les tripes, aux restau, ça ne passe pas. 

Peut-être qu'il vieillit tout court, Stephen King. Peut-être qu'il perd moins de temps dans les préliminaires fastidieux mais également moins de temps à bâtir des histoires qui tiennent la route. Sinon il y a une autre hypothèse, à vérifier : Stephen King est peut-être doublé par un être bizarre qui prend son apparence mais qui n'est pas lui et qui écrit des choses à sa place... Mais ça, ça n'est qu'une hypothèse, notez bien...

L'Outsider, de Stephen King. Ed. Albin Michel, col. Le Livre de Poche, 2019.