Eh bien j'avais tort. Oui j'avoue, j'ai souri, voire ri, devant les deux sœurs immondes de Cendrillon, ces potiches stupides, dont le jeu chorégraphique faisait transpirer leur caractère cruche. J'ai admiré cette horloge des douze coups de minuit, composée de douze danseurs au rythme saccadé et rapide, tombant l'un après l'autre au sol au moment fatidique. J'ai même apprécié les passages plus classiques, faits d'entrechats et de pirouettes romantiques. J'ai aimé l'adaptation du conte de Perrault à un monde plus moderne : nous sommes à Hollywood, et Cendrillon veut devenir actrice de cinéma. Elle rencontrera un acteur-vedette en guise de prince charmant, qui, après une mi-nuit mémorable à danser comme des petits foufous, la recherchera avec le soulier de verre perdu, dans des lieux de débauche : une taverne espagnole, un bouge chinois ou un cabaret russe... Tout cela sans dire un mot, juste en dansant ! Et j'ai tout compris ! C'est vous dire !
Il est vrai que l'oeuvre réunit toutes les qualités d'artistes de talent et d'auteurs grandioses : adaptation chorégraphique du grand Rudolf Noureev, sous la musique du grand Serge Prokofiev magistralement interprétée par l'orchestre. J'aurais sans doute pu vous livrer ces noms dès le début de cette chronique, vous auriez été convaincu d'emblée, et ça vous aurait évité de lire mes appréciations personnelles sans intérêt. Allez-y, continuez, soyez désagréables, de toute façon j'ai encore trois machines à étendre, trois kilos de linge à repasser, la vaisselle à faire et le balai à passer. J'ai aussi une drôle de pantoufle toute brillante à lustrer, mais je ne vois pas la deuxième... Si vous la trouvez, vous me dites.
Cendrillon, ballet en trois actes d'après le conte de Charles Perrault. Musique de Serge Prokofiev, adaptation, chorégraphie et mise en scène de Rudolf Noureev. A l'Opéra Bastille jusqu'au 2 janvier, dépêchez-vous enfin !