mercredi 26 mars 2014

Meilleurs vœux de Mostar : une tranche de vie dans les Balkans



Frano Petrusa raconte une belle histoire de gamin, avec ses émois amoureux, ses rivalités entre potes, ses bagarres de kids, ses admirations de héros sportifs... Tout ça dans une ville splendide...
Je reprends : Frano Petrusa est né en Croatie et part vivre en Bosnie-Herzégovine chez sa grand-mère, après la mort de sa mère, dans la splendide ville de Mostar. Il y vit ses premières années d'adolescence, ses émois amoureux pour une jeune fille musulmane, ses rivalités avec son pote serbe, ses bagarres avec des kids d'autres communautés, son admiration pour un basketteur black... C'est en 1991, et il devient "le plus heureux" de gamins de Bosnie-Herzégovine, pendant que la guerre frappe la Croatie.
Cette BD est très centrée sur la vie de l'auteur, avec ses anecdotes d'ado, mais laisse apparaître le contexte difficile de l'époque. Elle montre, en arrière-plan, puis insensiblement au premier plan, comment des conflits décidés ailleurs finissent pas réveiller des instincts identitaires excluant, dans un pays où des communautés diverses (religieuses et culturelles) avaient l'habitude de vivre ensemble. "Heureusement, il y a toujours un crétin qui arrive pour t'expliquer, pour te rappeler, à quel point nous sommes différents", écrit l'auteur, tandis que la ville commence à être défigurée par des bombardements.
Une belle BD, émouvante, délicate, qui plaide pour la fraternité avec subtilité. On aurait envie de la diffuser auprès de bon nombre d'électeurs français qui ont voté récemment pour le repli sur soi et l'exclusion des autres. Une méthode (le repli) qui n'a jamais, mais alors jamais, dans toute l'histoire de l'humanité, permis de s'en sortir.


Un ptit tour autour du sujet...

Voici où Mostar se trouve (je vous conseille la visite guidée proposée, c'est joli).
Mais avant, pour mieux comprendre le contexte de cette BD, faire un tour sur le site d'Hérodote pour lire un résumé de l'histoire de cette guerre des Balkans des années 90.

Meilleurs vœux de Mostar. Par Frano Petrusa. Ed. Dargaud. Coll. Long Courrier. 

vendredi 21 mars 2014

Bête à Bon Dieu : un polar sur la table de nuit



Je m'emm... à lire ce roman, mais je m'emm... Quatre fois (pas plus, pas moins) que je recommence à le lire. Et je n'arrive pas à trouver le déclic qui fait que ça m'intéresse, que je me passionne, que j'ai envie de lire la page suivante. Je n'ai même pas envie de vous raconter l'histoire, autant que vous la lisiez là (et encore, le début du résumé fait peur : "Bête à Bon Dieu est un livre crépusculaire et sans issue". Mdr, ptdr, lol.)
Résultat, impossible de passer les 50 premières pages. Frustration. Enervement. Envie de balancer le bouquin contre le mur. Ce côté insupportable des auteurs qui veulent faire de l'intimisme en entrant dans la tête du héro, et qui veulent en profiter pour faire des belles phrases "bien pensées". Genre : "Nous trimbalons notre monde avec nous". Ou "Si l'humanité ne supporte pas trop la réalité, elle n'a pas non plus besoin qu'on lui parle avec trop de vérité". On devine le gars qui veut faire des phrases mémorables. En attendant, puisque c'est un polar, je cherche toujours l'objet du défi. Du coup ça reste sur ma table de nuit, ça l'encombre, il y a de la poussière qui commence à grandir dessus...

Il y a des oeuvres comme ça, qu'on commence à lire et, chose terrible, on n'accroche pas. Ouf je ne suis pas le seul, sur ce blog quelqu'un s'épanche sur le même problème, et en plus sur des oeuvres qu'on n'a pas le droit de ne pas aimer. Mais je suis très d'accord avec elle, et je sens que j'ai les mêmes "non-envie" qu'elle. Et sur ce roman, non, je n'ai pas envie. Dommage, ça avait l'air bien.

Bête à Bon Dieu, une enquête de Lew Griffin. Par James Sallis. Folio. 


dimanche 9 mars 2014

Bello Ciao : mourir pour des idées d'accord, mais de mort lente



Dans la série on nous cache tout, on nous dit rien, l'affaire du manifestant tué à Gênes, en Italie, le 20 juillet 2001 pendant les journées du G8. Voici la présentation du pourquoi du comment de la BD en question, comme ça vous saurez tout :
"Le 20 juillet 2001 pendant les journées du G8 de Gênes, un manifestant est tué sur la place Alimonda. Les premiers témoignages sont confus : on parle d'un coup de revolver, d'une pierre ou de bombes lacrymogènes. Peu après, une photographie de l'agence Reuters révèle un jeune homme avec une cagoule et un extincteur qu'il soulève au dessus de sa tête tandis qu'une arme le vise depuis l'arrière d'une camionnette. La reconstitution hâtive s'arrête à cette photo retenue comme le point final d'une enquête qui semble déjà écrite : un manifestant est resté au sol, tué par un militaire lors d'une attaque des insurgés contre une camionnette de carabiniers. Un verdict de légitime défense prononcé non par un tribunal mais par des représentants politiques et forces de l'ordre et adopté par les médias."
Je ne doute pas qu'il y a quelque chose de douteux dans ce qui s'est passé, et que ce mort ne pouvait pas être totalement assumé par les forces de l'ordre. Le rapport mis en image dans cet ouvrage montre qu'il y a des zones d'ombres sur le déroulement des faits, et se centre sur la personnalité de la victime, qui n'était pas un fou furieux activiste gaucho mais un jeune tout simplement révolté par la violence policière qui se produisait alors.
La BD - ou plutôt l'enquête illustrée, tant les textes prennent la place de l'image - charge la responsabilité policière.
Elle aurait pu aussi charger la responsabilité des organisateurs de la manif qui a dégénéré : ces organisateurs savent que les forces de l'ordre font exprès de provoquer les manifestants, pour mieux pouvoir les réprimer. Et ces mêmes organisateurs ont besoin de leur lot de victimes, de blessés - ils ne pensent pas à la mort, bien sûr - pour mieux mobiliser... mobiliser contre quoi ? C'est une autre histoire, et d'ailleurs peu importe, les ultras gauchistes ne sont pas là pour apporter des solutions. Le jeune mort dans ces violences peut avoir été une victime de cet enchaînement stupide.
Mais ce n'est pas l'option de cette enquête. Une chose est sûre, en lisant ça, en voyant ce gâchis, ce mort, ces souffrances pour la famille, et au final l'inutilité totale de cet événement au regard des aspirations censées être portées par les manifestants, on se dit que Georges Brassens avait raison. Mourir pour des idées, d'accord. Mais de mort lente.




Pour aller plus loin

Les événements du G8 de Gênes de 2001 sur Wikipédia.
Les paroles de Mourir pour des idées, de Georges Brassens.

Bello Ciao : G8, Gênes 2001. Par Francesco Barilli et Manuel de Carli. Ed. Les Enfants Rouges.


mercredi 5 mars 2014

Les Pieds dans le Béton, la tête ailleurs



Il en va des BD comme des films : tu lis dans Télérama que tel film est super génial, le ptit bonhomme de l'hebdomadaire est heureux, tu te dis ok j'y vais, moi aussi je veux être heureux comme le bonhomme de Télérama. Et finalement tu t'ennuies, ou tu ne comprends rien. Tu sens bien que le film est intelligent, qu'il y a un message, que tu devrais l'aimer, que tu vas avoir honte de dire que tu t'es emmerdé à le regarder. Mais voilà, t'as pas aimé. Alors tu rentres chez toi penaud, tu te fais un plat de pâtes et tu te cales devant L'Amour est dans le Pré pour oublier.

Eh bien avec Les Pieds dans le Béton, c'est pareil. Toutes les critiques lues sur les blogs de BD (par exemple ici) sont bonnes, on sent qu'il y a du contenu, de la chair, de l'idée, mais je n'ai pas accroché, trop glauque tant du point de vue de l'histoire que des dessins.

C'est quand la prochaine saison de l'Amour est dans le Pré ?

Pour aller plus loin

Pas de doute, vous êtes venus lire cet article parce que vous voulez faire du béton. C'est facile, suffit de suivre le mode d'emploi.
A moins que vous ne soyez passionnés par le "ptit bonhomme de Télérama", qui s'appelle Ulysse, figurez-vous. Lisez ceci, on voit que les lecteurs de Télérama y sont super accros. Ca fait même peur, à la limite.
Sinon faites-vous plaisir, L'Amour est dans le pré, on n'a jamais été aussi proche de la prochaine saison... ;)


Les Pieds dans le Béton. Nicolas Wauters, Michael Ross. Ed. Sarbacane.