mercredi 24 novembre 2021

Erectus : La Planète du Jurassic Dead, ou The Walking Park des Singes


Et soudain l'humanité se mit à régresser. À Richards Bay, en Afrique du Sud, c'est le choc. Un homme s'est métamorphosé. Il arbore des mâchoires proéminentes, est couvert de poils, ne parle plus. Bientôt, à New York, Paris, Genève, des Homo erectus apparaissent en meutes, déboussolés, imprévisibles, semant la panique dans la population.
De quel virus s'agit-il ?
Que se cache-t-il derrière cette terrifiante épidémie ?
Une scientifique française, Anna Meunier, se lance dans une course contre la montre pour comprendre et freiner cette régression de l'humanité.
Partout, la question se pose, vertigineuse : les erectus sont-ils encore des hommes ?
Faut-il les considérer comme des ancêtres à protéger ou des bêtes sauvages à éliminer ?
Un cauchemar planétaire.
-Présentation éditeur-

Je ne sais pas si Yves Calvi de RTL et François Julien de VSD ont vraiment lu ce livre avant d'avoir émis leur avis (voir photo) mais soit non, soit non. Car Erectus, c'est pas bandant, pourrait-on dire si on aimait les jeux de mots pourris. Et le tome 2 intitulé "Erectus, l'Armée de Darwin" ne doit pas l'être non plus, en tout cas je ne ferai pas l'effort de le lire comme j'ai fait l'effort de terminer le tome 1.

Pourquoi ? Vous allez comprendre.
Allez, faisons cela sous forme de jeu. Je donne des éléments de l'intrigue, et vous dites à quoi cela vous fait penser.
- L'irruption de la préhistoire dans l'époque actuelle ? Jurassic Park ! Bravo ! 
- La vie et les mœurs des hommes préhistoriques ? La Guerre du Feu, oui.
- Des primates finalement assez malins et qui se verraient bien maîtres du monde... La Planète des Singes, quel talent ! 
- Des humains qui se transforment en bêtes immondes quand ils sont mordus. The Walking Dead, bien sûr ! 
- Et là attention il y a un piège : le danger d'un virus jusqu'alors inconnu qui se répand rapidement sur tous les continents ? Le Covid 19 ! Oui mais ce n'est pas encore un film. Mais ça ne saurait tarder.
Sinon vous pouviez aussi citer I Am Legend, et tout un tas de films de qualité. 

Mais ce n'est pas en s'inspirant de romans ou de films de qualité qu'on fait un roman de qualité. Or, c'est exactement ce qu'a fait l'auteur : un puzzle plus ou moins bien rapiécé avec les bonnes idées des autres. Et ça donne une soupe peu digeste, avec sous forme de liant une vague histoire sentimentale où, pour se vautrer vraiment dans le cliché de roman aguicheur, l'héroïne est enceinte d'un homme qui devient, évidemment, lui-même un Erectus. Et là on tombe sur une autre inspiration romanesque : La Belle et la Bête
"Roman aguicheur" ? Oui, la preuve Je devrais dire "film aguicheur". Car le thème, le style d'écriture, les références et les clichés sont manifestement étudiés pour intéresser un producteur de cinéma. Y a pas de raison, les films sources ont toutes été des succès du Grand Ecran ! 
Alors un conseil : allez les revoir, ces grands films, ou lisez leurs romans ou leurs BD. Préférez les originaux, et éparpillez cette pâle imitation façon puzzle.

Erectus et Erectus, l'Armée de Darwin, par Xavier Mûller. Xo Editions. 

mercredi 23 juin 2021

Dowtown Abbey : Sceau british !

Downtown Abbey

Ils sont fous, ces Anglais, mais qu'est-ce qu'ils sont plaisants... Je ne parle pas de la famille royale, qui finit par être assez crispante avec ses histoires internes sordides, ni du XV de la Rose qui est par définition détestable, encore moins de leur Brexit qui prêterait à rire si ce n'était pas si triste. Non, je veux parler ici des vrais Anglais, qui se divisent comme chacun le sait en deux populations : les aristocrates, et ceux qui travaillent pour eux.

Et la série Downtown Abbey, au moins, c'est de la vraie histoire de vrais britishs.  

Il y a les proprios, une famille bien riche - en tout cas qui puise dans les réserves accumulées au fil des siècles par ses aïeux - qui n'a jamais bougé son cul pour se servir un verre au robinet ni rangé une facture de téléphone dans le caisson bleu en métal qui sert à ranger les papiers. Et qui se sent en jogging-chaussettes-sandales quand elle oublie son queue-de-pie pour enfiler un simple costard. Il y a les parents, les filles, qui habitent sous le même toit - et quel toit ! - et la grand-mère qui préfère habiter ailleurs dans un autre pavillon

Et puis il y a les domestiques, hauts en couleur, la cuisinière qui râle mais qui a un cœur d'or ; le majordome très coincé et vieille-Angleterre, mais qui a un cœur d'or ; l'intendante qui est rigoureuse mais qui a un cœur d'or ; un sous-majordome qui est une super ordure mais qui finalement, a un cœur d'or, car il souffre ; et plein d'autres personnels qui sont tous un peu tordus mais qui ont du cœur. 

Et tout cela cohabite. Parfois aussi se mélange : si si, le chauffeur épouse une des filles du lord et devient donc un peu membre de l'aristocratie mais en même temps c'est un indépendantiste irlandais alors évidemment c'est dur niveau conscience de classe. Et au fil du temps - car les saisons s'étalent du lendemain du naufrage du Titanic qui a engloutit un héritier de Downtown Abbey, aux années 1920 ou 1930 - ce microcosme s'adapte plus ou moins aux avancées technologiques (l'arrivée du téléphone, de la TSF...), sociales et culturelles (surtout la place de la femme, en particulier après la guerre 14, celle du patriarcat et de la hiérarchie sociale).


Rien de grave

C'est bien beau tout ça mais qu'est-ce qui se passe, dans cette fucking série ? (Je dis un gros mot en anglais pour montrer que je suis bilingue et que fucking est un mot qui se marie bien avec l'anglais). Eh bien il se passe plein de choses, avec une constante impressionnante : quand quelque chose de grave se produit, il se résout en une quinzaine de minutes. Parfois en un épisode. Dans quelques cas précis, en 3 épisodes. Et dans de rares cas, mais ô combien symboliques, quand il y a des morts, eh bien ça ne s'arrange pas car la résurrection, ce n'est pas donné à tout le monde. 

Mais, outre ces épisodes excessifs, une fois qu'on a compris qu'au bout du compte tout va bien se passer, eh bien... tout se passe bien. Les patrons sont aristos mais comme on n'est pas à la Bastille, ils sont sympas, parfois réacs mais par moment étonnamment progressistes. Quant aux domestiques, comme on n'est pas au pays des soviets, ils sont sympas aussi, ok, mais aussi souvent réacs et par moments progressistes

Comme quoi...

Mais ceci étant dit, foin de sarcasmes. Downtown Abbey est une série plaisante, aux personnages hauts en couleurs, subtils car ni noirs ni blancs, aux anecdotes plaisantes et incessantes aux registres les plus variés - amours, trahisons, tromperies, vénalités, tendresse, souffrance, morts, naissances plus ou moins officielles, joies... 

Bref tout y passe, mais il en est dans cette série comme dans la vie : quand on veut paraître classe, ça cache quelque chose ; mais en même temps, avoir du pognon ça aide. 

Donc regardez les britanniques de Dowtown Abbey comme vous regarderiez  les Anglais sur un terrain de rugby : des gens apparemment de bonne famille qui évoluent discrètement comme des voyous. Mais le jeu est plaisant.

Downtown Abbey, série de 6 saisons, 52 épisodes, et un film, sur Amazon Prime Vidéo.

lundi 19 avril 2021

La Ligue des Gentlemen extraordinaires : Piège de nanar


Résumé.
1899. À la tête d'un groupe de terroristes, un inconnu se faisant appeler Le Fantôme menace l'ordre international en dressant les nations européennes les unes contre les autres. Devant la menace imminente d'un conflit majeur (Première Guerre mondiale), l'Angleterre décide de former la Ligue des Gentlemen Extraordinaires. Cette dernière est composée de l'aventurier Allan Quatermain, de Tom Sawyer un membre des services secrets américains, de la chimiste Mina Harker qui cache ses talents de vampire, de Rodney Skinner (L'Homme invisible), de l'immortel Dorian Gray, du docteur Henry Jekyll ainsi que du capitaine Nemo. Ces sept personnages hors du commun embarqueront à bord du Nautilus à destination de Venise, où ils devront contrecarrer les sombres projets du Fantôme. (Page Wikipédia).

Ce qui est pratique, quand on est abonné à un service de VOD, c'est qu'on peut se farcir un bon vieux nanar sans s'en vouloir. Cela ne coûte rien de plus. Et avec un peu d'humour en poche - parce qu'au deuxième ou troisième degré, tout passe -, parfois une bonne dose de patience - parce que même avec beaucoup d'humour, des fois ça lasse -, on peut passer un bon moment. 

Je ne dirais pas que se farcir "La Ligue des Gentlemen extraordinaires" fait partie des "bons moments". Disons plutôt que ce film fait partie de ces objets fascinants tellement ils sont exaspérants. Lisez simplement le pitch, ci-dessus, et déjà ça énerve tellement c'est n'importe quoi. Qu'on soit bien d'accord : chacun des personnage qui intervient dans ce film multi-héros est respectable, je dirais même admirable. Je ne connaissais pas Allan Quatermain avant de le voir sous les traits de Sean Connery, mais j'ai bien aimé Tom Sawyer quand j'étais petit car ses aventures m'ont transporté. J'ai adoré lire "L'Homme invisible" car qui n'a jamais rêvé de l'être. Dorian Gray m'a un peu gonflé parce que c'était un livre à lire au collège mais je peux dire maintenant que son histoire m'a fasciné. Le Docteur Jekyll m'a initié aux livres fantastiques. Dracula m'a plongé dans l'horreur, même si je ne connais pas personnellement Mina Harker. Quant au capitaine Nemo, il a été un des personnages les plus marquants de l'univers Jules Verne que j'ai dévoré dans ma pré-adolescence.  

C'est sans doute à cause de l'admiration que j'ai pour tous ces personnages et surtout pour les auteurs qui les ont créés, que je suis exaspéré par ce film de merde. En le regardant, j'ai pensé à ces écrivains, pris au piège car ils ne peuvent plus protester contre l'utilisation ridicule qui a été faite de leurs créatures, coincés qu'ils sont dans leurs tombes, dans lesquelles ils ont dû, nécessairement, se retourner maintes fois depuis la diffusion du film. D'autant qu'avec les mots qu'ils ont brodés pour écrire leurs œuvres, ils ont titillé l'imagination des lecteurs bien plus fortement que le grotesque scénario déroulé dans le film, accompagné de ce que je n'ose appeler des "effets spéciaux", à côté desquels, même ceux déployés dans Arsène Lupin avec Georges Descrières dans les années 1970 feraient passer pour un épisode récent de Star Wars

Vous avez compris : ne regardez pas ce nanar. Même pour rigoler. Ou alors si, pour une seule raison valable : si vous trouvez une explication à la présence du grand Sean Connery dans cette daube, dites-le moi. C'est la seule et unique intrigue vraiment palpitante de ce film.

mercredi 27 janvier 2021

La Boîte de Pandore : Justement, ne l'ouvrez pas

Présentation éditeur : Alors qu’il assiste à un spectacle d’hypnose, un homme est choisi dans l’assistance pour participer au numéro final. Dubitatif mais intrigué, René se plie au jeu et se retrouve soudain plongé dans une vie antérieure. Ce n’est que la première…
Au fil de ses découvertes, il comprend que ce qu’il a vécu dans ses vies précédentes peut influer sur sa vie présente. Professeur d’histoire, un nouveau défi passionnant se pose à lui : peut-il changer le cours de l’histoire, le réécrire et modifier ainsi la mémoire collective ?
De Paris à l’Égypte, en passant par l’Atlantide, un roman drôle et audacieux sur les mécanismes de la mémoire – individuelle ou générale – et le sens de l’histoire.

Est-ce utile d'émettre un qualificatif pour décrire ce roman ? Vous allez vite comprendre. C'est l'histoire d'un homme appelé René qui parvient par hypnose à rencontrer ses propres vies antérieures. L'une d'elle, la plus ancienne, est un Atlante, qui vit donc sur l'Altantide, où règne une civilisation nécessairement très évoluée d'un point de vue sagesse, et d'ailleurs la preuve c'est qu'ils sont végétariens et qu'ils mesurent 17 mètres de hauteur. Le gars René, c'est celui qui va sauver une partie des habitants de l'Atlantide en les prévenant qu'ils vont subir historiquement une catastrophe naturelle qui va conduire à la disparition de leur île. Son correspondant sur place - lui-même donc, dans une vie antérieure - le croit et va donc construire un bateau pour sauver ceux qui peuvent l'être. Pour remercier René, cette arche sera appelée - tenez-vous bien - l'arche de Néhé (c'est comme ça que les Atlantes peuvent prononcer René). Vous la tenez ? L'arche de Noé, oubliez tout de suite les origines bibliques : ça vient de René. Et les rescapés de l'Atlantide, que deviennent-ils ? Ils vont en Egypte où on retrouvera leurs ossements un jour, ou pas.

Car m'sieur René est historien. Enfin, prof d'histoire. Et il essaie de faire ouvrir les yeux de ses élèves sur la réalité qu'on nous cache dans des livres d'histoire trop académiques qui travestissent la réalité que lui, m'sieur René, connaît. On nous cache tout, que voulez-vous bande de moutons obsédés par le bac ! 
Sinon le gars René va croiser des tas de "lui-même" antérieurs : un combattant de 14-18 qui va tout lui expliquer sur la stratégie de guerre, une vieille riche qui va lui permettre de récupérer des lingots d'or, et d'autres personnalités qui tiendront, vers la fin du livre, une sorte de réunion où ils se rendront compte les uns et les autres que chacune de leur vie suivante a été marquée par un élément qui leur manquait dans leur propre vie. En gros, mon prochain "moi" sera riche et célèbre. A noter qu'aucun d'eux n'a été très choqué de rencontrer un gars qui leur dit "vous êtes mon ancien Moi, je suis votre Moi futur". N'essayez pas de vous présenter à moi de cette manière, je vous jure que je cours très vite prévenir des gentils messieurs à blouse blanche pour s'occuper de vous. 

Ceci dit, il y a bien eu un psy qui a tenté de s'occuper de lui. Pas de bol c'était un psychopathe qui le torturait en lui expliquant que c'était pour son bien. Sous-entendu : faites gaffe aux psys. 

Alors donc, faut-il qualifier ce roman ? Permettez-moi de me défouler, car j'ai tout lu jusqu'au bout en espérant que la fin proposerait un tel rebondissement que l'embarras que je traînais depuis les premières pages disparaîtrait. J'y vais : ce livre est une des pires clowneries que j'ai lues, et je ne pensais pas qu'un auteur aussi éminent que Werber oserait publier un truc pareil. C'est nul, mal écrit, l'histoire est grotesque, c'est pitoyable. Je n'avais lu de l'auteur que son premier roman sur les fourmis, que j'avais bien aimé. Je referme cette "boîte de Pandore" le plus vite possible en espérant que toutes les merdes qu'elle contient ne viendront pas polluer davantage la littérature. 

Une page au hasard

"Les géants." Ben oui, quoi.

La Boîte de Pandore. Bernard Werber. Le Livre de Poche. 2018.

mercredi 13 janvier 2021

Le Cœur sauvage : Des nouvelles de fer sous une plume de velours


Bûcherons, fermiers, vieux hippies, jeunes artistes ou adolescentes rebelles, les personnages de ces nouvelles vivent à la frontière de la civilisation et du monde sauvage, dans des endroits reculés du Vermont. Tous cherchent à donner un sens à leur solitude et à leurs rêves, au cœur d'une nature à laquelle ils sont, souvent malgré eux, viscéralement liés. L'eau noire et glacée des lacs, l'odeur des champs en juin, la senteur de la résine, les forêts à perte de vue... Robin MacArthur évoque avec puissance et grâce cet univers à la fois âpre et beau, où se reflète l'âme de ses habitant. 
Présentation éditeur.

Parmi les plus belles nouvelles que j'ai lues dans ma chienne de vie. Le lecteur vit une véritable immersion dans l'univers du Vermont, dans la tête des personnages, dans leur vie, leurs pensées, leurs angoisses et leurs joies. Contrairement au vacancier qui plonge direct dans l'océan et en ressort en affirmant fièrement "Au début elle est froide, après elle est bonne", le lecteur va ici vivre en première impression une sorte d'aventure moelleuse portée par une narration calme, merveilleusement envoûtante voire poétique, d'une langueur pas du tout monotone enrichie d'images et de descriptions magnifiques. Mais un malaise grandit en entrant dans la vie des personnages, et l'émotion au début positive se transforme en fin d'histoire en une interrogation : finalement, derrière le calme apparent qui règne ici, n'y aurait-il pas un chaos sur le point de s'exprimer ? La plume de velours ne cacherait-elle pas une violence de fer ? Poser la question c'est y répondre.

Une page au hasard



Le Cœur sauvage, de Robin MacArthur. Ed. Albin Michel, coll. Terres d'Amériques. 2017.