vendredi 1 juillet 2016

Les Vieux Fourneaux : Ces croûtons qui attachent


Pierrot, Mimile et Antoine, trois septuagénaires, amis d'enfance, ont bien compris que vieillir est le seul moyen connu de ne pas mourir. Quitte à traîner encore un peu ici-bas, ils sont bien déterminés à le faire avec style : un œil tourné vers un passé qui fout le camp, l'autre qui scrute un avenir de plus en plus incertain, un pied dans la tombe et la main sur le cœur. Une comédie sociale aux parfums de lutte des classes et de choc des générations, qui commence sur les chapeaux de roues par un road-movie vers la Toscane, au cours duquel Antoine va tenter de montrer qu'il n'y a pas d'âge pour commettre un crime passionnel.

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Le résumé ci-dessus, ce n'est que le premier épisode. Il y en a trois. Du vrai bonheur. Non, ça ne donne pas envie d'être vieux plus vite que la musique, parce qu'ils sont pas mal chiants les trois vioques. Entre Antoine le nostalgique, Pierrot qui pense encore au Grand Soir et Mimile qui plane à quinze mille, il y a de quoi faire péter les plombs à n'importe qui d'à peu près "normal". D'ailleurs la seule "normale" de la bande, c'est une jeune femme, petite-fille d'un des vieux, maman d'un bébé, qui ramène à l'ordre autant que possible cette marmaille ridée qui n'a jamais tout à fait grandi. Et qui leur rappelle, pour qu'ils cessent de se prendre pour des dieux, l'état dans lequel ils ont légué le monde à leur descendance...

N'empêche qu'ils sont attachants ces croûtons. Parce qu'on s'y retrouve assez bien. On se demande en lisant cette BD "Mais comment je serai moi, à cet âge ?" Certes il suffit parfois de regarder son propre père, mais là ça compte pas, ça fait trop peur (pardon papa, je rigole). Serais-je Pierrot, cet emmerdeur activiste qui anime le collectif "Ni Yeux, Ni Maître", et qui pourrit la vie de tous ceux qui se complaisent dans le Grand Capital ? Ou qui occupe pendant plusieurs jours, avec ses autres copains buveurs de thé et joueur de belote, un bistrot pour jeunes un peu trop bruyant pour forcer le patron à négocier une baisse de décibels...

Serais-je Antoine, qui se fait du mal en pensant à ses amours d'antan ou à ses rivaux maintenant grabataires ? Ou bien Mimile, le taiseux du trio, et qui pourtant pourrait raconter une vie pleine d'aventures qu'il a vraiment vécues, et des histoires qu'il imagine ?

Allez je ferais une réponse facile : un peu des trois, j'espère. Mais si je pouvais garder aussi un peu de la jeunesse adulte et responsable que porte la jeune maman, qui tente tant bien que mal de survivre au milieu de ces histoires de gamins de 70 ans, ça pourrait peut-être m'aider à rassurer mes propres enfants et petits-enfants qui devront me supporter. Ou pas, d'ailleurs... C'est jeunes sont cruels, je vais les engueuler dès ce soir, en anticipation.

En quelques mots, cette BD est à placer entre toutes les mains, à la peau lisse ou ridée : c'est plein d'humour, chargé d'émotion, on en ressort avec le sourire. Et on attend le 4e tome. Bref, ces histoires de vieux qui font leur crise d'ado, c'est bath.

La Page 7


Les Vieux Fourneaux. Tomes 1, 2 et 3. Paul Cauuet, Wilfrid Lupano. Editions Dargaud.

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