samedi 18 novembre 2017

La Nueve : La Libération entre hombres et lumières


La majorité des hommes qui composaient la Nueve avaient moins de vingt ans lorsqu'ils prirent les armes, en 1936, pour défendre la République espagnole : les survivants ne les déposeraient que huit ans plus tard après s'être illustrés sur le sol africain et avoir libéré Paris dans la nuit du 24 août 1944. Ils étaient convaincus de reprendre la lutte contre le franquisme. Avec de l'aide qui ne viendra jamais...(présentation éditeur)

Libérer la France de l'occupant allemand lors de la dernière guerre mondiale n'a pas été l'oeuvre des seuls Américains, ni des seuls Résistants, ni des seuls De Gaulle ou Leclerc. Beaucoup de chacun d'eux, certes, et beaucoup de l'addition de leurs forces, il va de soi. Mais il y a aussi tous ces inconnus qui y ont contribué. Ces "sans-dents" de la grande histoire du monde, dont on ne parle pas, simplement parce que leur action a été diffuse, éclatée, volontairement anonyme. Mais le silence est parfois injuste, quand ils se sont volontairement engagés pour combattre le nazisme et le fascisme : c'est le cas de ces Républicains espagnols qui ont combattu auprès des forces alliées pour libérer notre pays, et notamment Paris (en composant la 9e compagnie, la "nueve", dans la 2e DB du Général Leclerc), dans la continuité de leur combat raté contre Franco, et espérant le soutien du reste du monde libre pour rétablir la démocratie dans leur pays. Espoir terriblement déçu...

Combattants sanguinaires

Paco Roca raconte dans ce très bel album son entrevue avec l'un de ces anciens combattants espagnols profondément antifascistes, Miguel Ruiz, 94 ans. Avec beaucoup de pudeur, il relate ses échanges, met en scène l'histoire que retrace le Républicain. Des échanges difficiles au début, car Miguel n'a aucune envie de remuer les souvenirs, et sa modestie souffre - cette histoire, son histoire, il ne l'a jamais racontée à personne. Peu à peu il prend confiance, et ce qu'il livre révèle une aventure collective et personnelle tragique, d'une grande force, de ces engagements qui transportent une vie par leur puissance et leur évidence, la lutte antifasciste en constituant le moteur essentiel. La haine du nazi et du fasciste faisait de ces Espagnols des combattant sanguinaires, que l'on plaçait facilement en première ligne, indique le livre. Des sentiments violents qui, avec l'âge, posent question à Miguel. Mais pour lui, c'est très clair : si c'était à refaire, il le referait, pour barrer la route au nazisme. Il raconte ce jeune SS qui, à la Libération, est blessé mais préfère être saigné à blanc plutôt que de risquer d'être transfusé avec du sang juif : "Ça nous rappelle pourquoi nous combattions".
Pourtant, ces combattants républicains ont été oubliés. Et l'Espagne n'a pas été libérée, les Alliés préférant laisser Franco au pouvoir que de risquer l'arrivée des communistes.  Cet album remet en lumière ce pan de l'histoire, ses acteurs sur lesquels elle met des noms, des visages, des singularités, et ce n'est que justice. Le dessin est efficace, à défaut d'être romantique et trop bien léché comme beaucoup de productions bdéesques historiques qui peuplent les têtes de gondoles des librairies spécialisées. Il a une âme, une personnalité. A l'image de Miguel Ruiz, combattant antifasciste. 


La page 276 (pourquoi celle-là ? Parce que)


La Nueve, de Paco Roca. Ed. Delcourt, 2014.

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