lundi 1 août 2016

Tarzan : Toi Nature, moi British


Juin 1888. Lord John et lady Alice voguent à bord d'une goélette au large de l'Afrique. À la suite d'une mutinerie, ils sont débarqués sur la côte. 
Là, dans une cabane construite non loin de la plage, Alice met au monde leur fils, John Clayton III, comte de Greystoke. Un an plus tard, elle meurt, avant qu'un grand singe vivant dans la forêt voisind pénètre dans la cabane et tue John. 
Kala, une jeune femelle, s'empare alors du bébé humain et s'en occupe comme s'il était le sien. Elle lui donne le nom de Tarzan, "peau blanche". 
Tarzan est âgé d'une vingtaine d'années quand il rencontre une équipe d'explorateurs anglais conduite par le Pr Porter et sa fille Jane...
(4e de couverture)

Ce "roman culte" est tout simplement palpitant. Parce que le lecteur plonge dans l'Aventure avec un grand A : c'est la jungle, peuplée d'animaux féroces qui ne comprennent que le rapport de force, les luttes mortelles, la violence... Dans ce milieu hostile sont débarqués contre leur grés John et Alice, véritable représentants de la haute caste anglaise, maniérés je ne vous dis que ça. Perdus dans cette nature dominante, Alice promet à son mari qu'elle fera "de son mieux pour être une brave épouse préhistorique". John quant à lui défendra sa femme face à un grand singe hostile en la prévenant : "Je me charge de ce bonhomme avec une hâche !" Ce "bonhomme" pour parler d'un singe... Comment vouliez-vous que ces gens restent en vie...
Leur fils en revanche, Tarzan, né dans cette jungle, se débrouille très bien. Recueilli par une singe quand il est nourrisson à la mort de John et Alice, il ne connaît rien de ses origines et grandit avec les animaux. 

Pas la moitié d'un naze
Et c'est là que l'histoire dépasse le simple roman d'aventure. Car Tarzan connaît les affres du conflit d'identité. Qui suis-je ? Un singe obéissant aux instincts car j'ai été élevé dans la nature ? Ou un homme qui respecte des bases culturelles de comportement car mes gènes sont humains ? On retrouve les questionnements et les quasi-certitudes qui planent dans le débat public de l'époque du roman (1912). L'Humanité doit primer sur Dame Nature. Ainsi, bien que Tarzan n'ait presque jamais vécu dans une communauté humaine, c'est pas la moitié d'un naze. Il apprend même tout seul à lire, avec un abécédaire retrouvé dans les vestiges laissés par ses parents naturels. On se demande à quoi servent les instits. Il apprend tout seul à nager, à tirer à l'arc, à faire des noeuds avec des cordes qu'il fabrique... C'est un vrai scout. Un MacGyver. Mieux : un étudiant de Cambridge. Un être naturellement supérieur, doué d'humour (ah ! jeter une tête de mort sur un groupe de Noirs pour leur faire peur ! Bidonnant ! Du Benny Hill dans le sketch ! Il faut dire que le Noir est superstitieux et couard) et surtout "têtu comme un Anglais" (sic dans le texte !). 

Coup de foudre
Ce n'est pas tout. Non content d'être intelligent, malin, doté de l'humour british, et beau comme un Dieu, il est aussi capable d'émotions. Je ne vous raconte pas tout, mais dès qu'il voit Jane, il sent monter en lui une impression bizarre. Alors ne cherchez pas le coup du "Moi Tarzan, toi Jane", ça ne figure pas dans le texte d'origine. En revanche le coup de foudre de Jane pour "l'homme sylvestre" (resic !) oui. Et c'est réciproque. Une nouvelle occasion pour Tarzan de se demander qui il est : pensez donc ! Un vrai singe possède pleinement sa femelle. Mais lui, quel comportement doit-il adopter ? Une fois qu'il a libéré Jane des pattes du grand singe stupide Terkoz, il agite ses neurones. Jugez plutôt sa réflexion : 
 
Rassurons-nous, Jane ne deviendra pas l'objet sexuel de Tarzan. La Civilisation est plus forte. Tarzan finira par s'adapter rapidement aux moeurs humaines occidentales. Il aurait pu être juste un homme un peu bestial. Mais c'est un British avant tout, Dieu merci. Cette bagarre entre nature et culture, animalité et britishitude constitue le vrai fil rouge du roman. Jusqu'à sa dernière ligne. 

La page 77

Tarzan, seigneur de la jungle. Par Edgar Rice Burroughs. Ed. Archipoche. 

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